Numéro 68 Bulletin épidémiologique
Editorial
Ce numéro spécial décrit les dispositifs de vigilance sur la chaîne alimentaire et les met en perspective par rapport aux dispositifs de surveillance encadrés par des textes réglementaires spécifiques (par ex. surveillance des zoonoses, surveillance des contaminants chimiques). Il est complémentaire du numéro 50 (mai 2012) qui décrivait les dispositifs de surveillance de la chaîne alimentaire.
La surveillance permet une collecte régulière de données afin de répondre à des besoins d’évaluation des risques et in fine, d’adopter des mesures appropriées pour la gestion de situations à risque connues. La mise en place de dispositif de surveillance est donc une démarche a posteriori. Elle incombe aux exploitants et aux autorités sanitaires, notamment en termes de vérification de la conformité à la législation alimentaire et de détection des situations non maîtrisées.
La vigilance vise la détection de situations ponctuelles considérées comme potentiellement dangereuses pour le consommateur. Les dispositifs doivent contribuer à la détection de nouveaux contaminants ou de phénomènes émergents. La mise en place de dispositifs de vigilance est donc une démarche a priori. Selon les prescriptions générales du Paquet hygiène, cette responsabilité incombe explicitement aux autorités nationales (article 34 du règlement 178/2002). Les exploitants n’échappent cependant pas complètement à cette exigence, dans la mesure où ils sont les premiers responsables de la sécurité des produits mis sur le marché ; les procédures fondées sur les principes HACCP incluent par définition une veille à l’égard des nouveaux dangers à considérer dans les plans de maîtrise sanitaire.
Dans le domaine des contaminants microbiologiques, si la survenue des cas humains apparaît souvent comme le déclenchement d’actions à mettre en oeuvre sur la chaîne alimentaire, des dispositifs de détection des contaminants le plus tôt possible sur la chaîne alimentaire permettraient de réduire le nombre de ces cas humains. Dans le domaine des contaminants chimiques, il convient d’avoir une approche plus ouverte sur les contaminants à rechercher, en l’absence de risques aigus, sans avoir pour autant la capacité de tout surveiller. L’activité de vigilance doit ainsi permettre de détecter, sur des périodes de temps variables, des situations inhabituelles, tout en garantissant des mesures de gestion proportionnées au risque, dans des délais appropriés.
Dans cette perspective, une démarche analytique performante combinée à des méthodes innovantes d’analyse de données sont en faveur de la caractérisation des nouveaux contaminants, ou de nouvelles voies de contamination. De plus, il convient de privilégier les espaces de mutualisation afin de repérer des signaux faibles qui ne seraient pas détectés par les dispositifs pris individuellement. L’optimisation d’une telle démarche repose sur les interactions entre les acteurs en charge de la surveillance de la santé animale, humaine et de la sécurité sanitaire des aliments. En effet, la politique de sécurité sanitaire de l’alimentation, incluant notamment les activités de vigilance, doit s’appuyer sur une évaluation globale, intégrant les aliments, les animaux et l’Homme. Ainsi des signaux détectés dans un secteur peuvent contribuer à l’orientation des activités de vigilance des autres secteurs, pour éviter l’apparition ou le développement de situations à risque.
L’évaluation des risques apparaît au coeur de l’activité de vigilance, qui doit également s’accompagner de travaux de recherche, pour que les mesures de gestion soient définies dans les meilleurs délais et qu’elles soient proportionnées au risque.
Les articles présentés dans ce numéro illustrent plusieurs dispositifs et méthodes contribuant à la vigilance par les pouvoirs publics et les opérateurs de la chaîne alimentaire vis-à-vis de contaminants microbiologiques ou chimiques, au niveau national et européen.
L’édition de ce numéro spécial a en outre permis de constater que la mise en place de dispositifs de vigilance sur la chaîne alimentaire repose sur des fondements scientifiques et techniques plus ou moins développés. La perspective d’optimiser ces dispositifs illustre l’intérêt d’un espace de concertation dédié à l’épidémiosurveillance dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments.
Le comité éditorial ad hoc